Goethe

Plus de doute. Les textes sont clairs. Goethe a passé à Saillon. Il en parle dans ses souvenirs. C'était en novembre 1779. Le poète avait trente ans. Accompagné du duc de Weimar, il entre en Suisse par Bâle. En souvenir de Rousseau, il s'attarde à l'île Saint-Pierre. Il fait un crochet par Genève où il s'entretient avec Saussure sur le danger des Alpes. Prudemment, il se fait accompagner d'un chasseur de chamois et gagne Martigny. A l'auberge de la Grande Maison, pour se revigorer il prend un bain en mêlant à l'eau chaude du vin et du son. Les jours suivants, après avoir admiré la Pissevache, le voici, à cheval, galopant sur Saillon. Quel honneur ! Goethe, l'un des écrivains les plus illustres de tous les temps, le géant du romantisme allemand. Werther, Faust, Dorothée, Marienbad ... c'est lui !

Goethe arrive à Saillon le 8 novembre 1779. Il écrit: «Ce chemin est mauvais et pierreux, mais chaque pas nous offre un paysage digne du pinceau. Ce chemin nous conduisit à un château élevé, Saillon, d'où l'on a sous les yeux l'une des plus belles vues que j'aie rencontrées dans mon voyage. Le poète s'enivre de tant de beautés. Il écrit:" Des deux côtés, les montagnes s'enfoncent dans la terre avec leurs assises. La largeur entière du Valais s'étale sous nos yeux. Le Rhône passe devant les villages, les prairies, les collines. Un véritable amphithéâtre fermé par une chaîne de montagnes blanches illuminé par le soleil de midi." Goethe note avoir dégusté avec le duc de Weimar un vin de la région, différent sans doute de celui qu'on versa dans son bain à Martigny pour calmer sa fatigue.

Il dit le charme que les treilles ont opéré sur lui. Il note non sans malice à propos des gens d'ici: "Chaque petit coin de terre pour eux est précieux. Ils plantent leurs ceps tout contre les murs, des ceps qui parviennent à une hauteur extraordinaire, amenés qu'ils sont au dessus du chemin au moyen de pieux et de lattes..."
Il parle "du fleuve qui s'en va paresseux, parmi les rochers et les ruines féodales". Le poète poursuit son voyage sur Sion, Sierre, Brigue. Les senteurs forestières de la vallée l'enivrent. Le silence des Alpes l'amuse. Une servante dont les joues colorées ressemblent à des pommes l'émeut.

Après avoir quitté Saillon et la région, Goethe note dans son calepin la plus belle phrase qui soit à notre endroit: Il se dit tout simplement. HEUREUX. Que nous faut-il de plus?

 

Pascal Thurre

 

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